Le projet phare de Xi Jinping : les Nouvelles Routes de la Soie (NRS) envisage une amélioration des axes commerciaux eurasiatiques. Fondé sur les valeurs du « gagnant-gagnant » et de « coexistence pacifique », il vante une Chine prospère et mondialement influente. En 2016, la Chine a recalibré sa politique extérieure avec le pivot arabe. Cependant, les dynamiques régionales abrasives en font une destination d’investissement risquée. En tant que projet géoéconomique supposant une stabilité politique, les NRS se heurtent au conflit prolongé de souveraineté en Israël-Palestine. Israel Chine

要想富先修路: Pour devenir riche, d’abord construire des routes.

La République Populaire de Chine (RPC) est en passe de devenir un membre des sphères politiques et sécuritaires régionales dans le but de protéger ses intérêts outre-mer, entraînant un relèvement des efforts de paix. Découlant de ces enjeux stratégiques, Pékin se voit contraint de transformer sa posture diplomatique afin d’affronter d’éminentes incertitudes géopolitiques et d’endosser un rôle stabilisateur dans le conflit israélo-palestinien.

Ce contrepoids politique au Moyen-Orient représente une séparation avec la pierre angulaire de la constitution chinoise : le précepte de non-interférence. Toute intrusion dans les affaires régionales peut provoquer une friction avec les Etats- Unis, étant le médiateur de conflit en fonction.

Dans notre tentative de déterminer si la Chine dispose du potentiel nécessaire afin de devenir un contributeur légitime dans le processus de paix israélo-palestinien, nous proposons le questionnement suivant : de quelle manière Israël et la Palestine sont-ils impliqués dans le pivot arabe ?

Après un aperçu de la politique extérieure chinoise et des relations avec Israël et les territoires palestiniens, nous examinons la diplomatie économique, en référence à des perspectives politiques et sécuritaires, illustrés dans notre étude de cas : le pilotage par Pékin d’un sommet pour la paix en Israël-Palestine. Enfin, nous offrons un éventail de recommandations.

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Nouvelle doctrine de politique extérieure chinoise

Dans le paysage politique international, la Chine est passée d’un rôle périphérique depuis le « siècle de l’humiliation » avec sa conception westphalienne de la territorialité et souveraineté nationale d’autres états, devenant la clé de voûte de sa politique extérieure, à un rôle central dans le monde. Dès son adhésion à l’OMC en 2001, la Chine a vu ses intérêts se propager à la région MENA. En 2013, le leadership affirmé de Xi marque un tournant, avec : développement d’une flotte militaire, articulation des NRS, rapprochement avec des gouvernements instables et consolidation d’une influence globale.

L’expansion des relations sino-arabes est encadrée par des documents officiels :

  • En 2014, la sixième Conférence Ministérielle du Forum de Coopération de la Chine et des états arabes (CASCF) préconise des objectifs de développement communs et de respect mutuel.
  • En 2016, au siège social de la Ligue Arabe, Xi formule un engagement pour des négociations de paix en Israël- Palestine.
  • Le document de politique arabe de 2016 légifère une stratégie de coopération avec les pays du CCG autour de la construction d’infrastructures, de technologies innovantes et d’une diplomatie de partenariats.1
  • Le document de la Vision de Coopération Maritime des NRS articule des objectifs de coopération politique. Bien que critiqué pour sa nature davantage symbolique que substantielle,2 3 le pivot arabe est ainsi formalisé en tant que politique économique indépendante au Moyen-Orient. Les considération politiques déclenchent donc un renouveau de la réputation internationale de la Chine.

La stratégie géoéconomique de Pékin est typiquement basée sur une conception de l’insécurité régionale étant causée par une stagnation économique et solutionnable par une amélioration des niveaux de vie. Cette approche de la médiation de conflit par l’enrichissement des moyens de subsistance du peuple s’inscrit dans un large plan de développement pour la paix, en opposition aux recommandations néolibérales revendiquant paix et démocratie.4 5

Au-delà des promesses économiques, la « diplomatie de médiation chinoise » a des implications géopolitiques considérables en Israël-Palestine. La volonté de Pékin de progresser unilatéralement vers une résolution du conflit par la croissance6 7 se concrétise autour d’instruments allant de successives propositions de paix depuis 1989, un Envoyé Spécial depuis 2002, des forces de maintien de la paix UNTSO à Jérusalem et plus récemment, un forum pour la paix. Avec le pivot arabe, les ambitions chinoises deviennent multi-dimensionnelles : galvaniser la croissance domestique ainsi que la compétitivité internationale pour le centenaire de 2049. Les NRS sont un projet pharaonique pour atteindre ce but en dépit de plusieurs énigmes à résoudre.

Avec la gouvernance transformationnelle de Xi, l’image de soi des chinois s’est affirmée en une identité nationale patriote ayant des ramifications en politique extérieure. La rhétorique officielle s’est vue insufflée d’une philosophie classique et de nouvelles idéologies : l’univers sino-centrique du Tianxia (天下) ; le rêve chinois (中国梦) et la revitalisation nationale ; un langage de magnanimité et générosité ; des mythologies des Routes de la soie faites de transferts de technologies pour améliorer la connectivité transcontinentale.

Xi a ainsi réussi à recueillir un avis général favorable pour ses réformes. Grâce à une doctrine de politique extérieure entérinant l’exceptionnalisme chinois : « diplomatie de grand pays aux caractéristiques chinoises » (中国特色大国外交) ainsi qu’au soutien régional pour l’expansion géoéconomique et philanthropique de la RPC, Xi s’est vu endosser des responsabilités de gestionnaire sur la scène internationale.8

Les moyens d’action déployés s’étendent d’instruments culturels : les instituts Confucius, à des institutions financières offrant de l’assistance aux pays en voie de développement, produisant par conséquent un soft power aux caractéristiques chinoises, consolidé par la modernisation récente du dispositif militaire signalant une disposition d’action de grande ampleur.

Le pivot arabe, l’identité actualisée et les projections de pouvoir de coopération et de coercition contribuent à élever la Chine à un statut de partenaire économique et allié politique consciencieux.

Le processus d’Oslo étant moribond et la crédibilité américaine brisée, Pékin s’est vu proposer le rôle d’arbitre du processus de paix israélo-palestinien. Cette nouvelle orientation du pivot arabe arbore des avancées économiques et une dimension politique embryonnaire visibles dans les relations bilatérales avec Israël et la Palestine.

Les relations économiques sino-israélo-palestiniennes

Les relations entre la Chine et Israël vont du commerce aux investissements en technologie militaire. En 2019, le niveau de commerce bilatéral s’élève à US$14.7 milliards, rendant la Chine le troisième partenaire commercial d’Israël.9 Les investissements chinois étaient de US$1.5 milliards en 2018, la plupart en hautes technologies,10 malgré les contraintes sécuritaires imposées par les Etats-Unis. Les liens sino-palestiniens souffrent d’un déséquilibre dramatique avec un commerce bilatéral de seulement US$73 millions en 2019, majoritairement composé composé d’exportations chinoises.11 Les investissements chinois sont marginaux : US$0,7 million tandis que l’assistance humanitaire augmente depuis la promesse de don d’un montant de US$15 millions en 201812. L’engagement commercial de la Chine dans la région se diversifie et ces dynamiques trilatérales permettent l’émergence de multiples perspectives économiques, politiques et sécuritaires malgré de tangibles écueils.

Implications sur le terrain : opportunités et limites

La diplomatie économique en Israël-Palestine donne lieu à de nombreuses occasions pour Pékin de démontrer son pouvoir politique dans le processus de paix. Les NRS et instruments économiques associés doivent garantir le bien-être et la prospérité des deux peuples. L’habileté politique chinoise dépourvue de conditionalité et la diplomatie de ‘quasi- médiation’ excluant toute intervention militaire offrent à Pékin une position privilégiée d’acteur externe impartial aux croyances non-abrahamiques, s’attachant à collaborer avec chaque faction politique dont le Hamas afin de promouvoir sa méthode consultative en résolution de conflit13 14 conduisant à un élargissement de ses canaux d’influence.15 L’activisme régional chinois se développe vers un paradigme sécuritaire sino-centré depuis les pays du CCG dans le but de créer des interdépendances et d’amorcer un dialogue politique afin de déclencher un essor économique ayant des retombées pacificatrices en Israël-Palestine.16 17 18Les NRS et cette combinaison d’incitations économiques et sécuritaires devraient permettre à Pékin d’endosser le rôle de stabilisateur politique.

Néanmoins, certains risques géopolitiques persistent. L’argument de « croissance mutuelle » pourrait ne pas être transférable dans une zone de conflit tant que la promesse de prospérité économique n’est pas concrétisée. Des défis politiques découlent du style de médiation chinois ‘partiellement détaché’. En agissant dans l’inertie en tant qu’abonné absent des conflits régionaux du fait d’un refus catégorique d’amender son précepte de non-ingérence, l’aversion pour le risque de Pékin a jusqu’ici donné lieu à des stratégies d’évitement laissant place à l’inaction.19 Les plans de paix vagues, le manque de politique cohérente et de solution viable, un leadership local frêle et la réticence à s’enchevêtrer pourraient endommager l’image de la Chine comme partie prenante fiable.20 21 22 Fuyant les responsabilités liées à son activité économique, l’approche de Pékin en management de conflit pourrait s’avérer contreproductive et conduire à un scénario de paix négative sans résoudre les facteurs sous-jacents. L’architecture de sécurité collective pan-régionale est un projet dormant datant des années 90. Ce qui fait défaut aux NRS pour répondre aux obstacles endémiques régionaux c’est une dimension sécuritaire incluant un réel dispositif anti-terroriste.23 Il manque à Pékin les capacités pour projeter son pouvoir militaire, ce qui limite son aura politique à rester dans l’ombre de celle des Etats-Unis.24

Ces restrictions structurelles compromettent le militantisme chinois pour la paix en Israël-Palestine. La posture de Pékin en tant qu’entrepreneur et médiateur de litiges internationaux est incohérente avec ses valeurs constitutionnelles. Les coûts de gouvernance politique pourraient l’emporter sur les bénéfices économiques, causant de possibles rivalités entre grandes puissances.25 Les implications ambivalentes de la diplomatie de paix chinoise sont visibles dans notre étude de cas.

Le Symposium de Paix en Palestine-Israël commandité par la Chine (巴勒斯坦以色列和平人士研讨会)

L’analyse du forum trilatéral qui s’est tenu les 21 et 22 décembre 2017 à Pékin avec la venue d’une délégation israélienne et palestinienne permet des déductions sur le pivot arabe quant aux réactions de la presse internationale.

Chen Xiaodong – vice-ministre des affaires étrangères à la cérémonie d’ouverture du symposium

La culmination des intérêts chinois en l’initiation d’un dialogue régional et la conduite d’une navette diplomatique a donné lieu à des mesures non contractuelles stipulant un engagement pour des efforts de résolution de conflit selon le principe de la solution à deux états, avec :

  • L’instauration d’un état palestinien selon les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale,
  • La promotion d’un travail multilatéral à Jérusalem par les dirigeants et acteurs locaux des deux parties,
  • Un soutien politique et économique de la communauté internationale pour la résolution conjointe de la crise humanitaire à Gaza,
  • L’interruption de la colonisation ainsi que des mesures de sécurité pour protéger les relations israélo- palestiniennes.26

Conçu comme une alternative aux sommets de paix menés par les pouvoirs occidentaux, le symposium est un projet confucéen remplaçant le paradigme coercitif d’intervention de paix, facilitant le positionnement de la Chine en tant que puissance conciliatrice. Son approche pragmatique vise un engagement constructif via la création d’une plateforme de négociation afin de permettre aux deux parties d’explorer ensemble de nouvelles voies.27 28

Le forum s’inscrit dans la lignée de la ‘Conférence pour la Paix au Moyen-Orient’ de janvier 2017 en France et précède la réunion des Etats-Unis pour la paix en Israël-Palestine de juin 2019 à Bahreïn. Pékin parvient ainsi à éviter l’écueil de non-représentation des antagonistes, ce qui renforce sa position de perturbateur de conventions en matière de sommets pour la paix, lui conférant une marge de manœuvre conséquente.

Grâce à sa relation privilégiée avec chaque partie, sa doctrine de non-ingérence, son évitement délibéré d’engager des programmes politiques en se cantonnant à un rôle d’arbitrage diplomatique effacé, Pékin réussit à faire émerger la construction d’une confiance mutuelle.

Concomitamment, le symposium reste une pâle tentative en résolution de conflit. Le procédé de sommet pour la paix doté de mesures symboliques est inachevé et n’a jusqu’ici pas porté ses fruits. L’absence de ressource significatives allouées au projet indique la complaisance de la Chine qui chercherait à échapper à tout embarras géopolitique en limitant délibérément son rayonnement à la sphère économique. 29

Les relations internationales s’avèrent être à dominante défavorables selon notre étude de la couverture médiatique du symposium. Nous avons analysé les comptes-rendus de l’évènement par des recherches par mots-clés sur le site internet de chaque organe de presse en relation avec les efforts de construction de paix chinois en Israël-Palestine. Notre analyse s’ensuit.

Les médias chinois ont dépeint l’initiative comme un nouveau genre en relations internationales, potentiellement bénéfique à la politique mondiale. Ces commentaires furent relayés dans la presse israélienne.

L’attention internationale fut monopolisée par le vote de l’ONU contre la reconnaissance de Jérusalem en tant que capitale indivisible d’Israël quelques jours plus tôt par Donald Trump. Seulement deux des médias analysés ont mentionné le symposium : Al Jazeera, offrant l’unique reportage optimiste de l’évènement bien qu’a posteriori avec dix mois de retard. Les informations françaises fournirent une perspective pessimiste le lendemain.

Il apparait que ceux qui n’ont pas couvert l’évènement l’ont fait pour des raisons similaires :

  • Les médias indiens louent le rôle de l’Inde dans le conflit israélo-palestinien, à la faveur d’un mécanisme d’arbitrage multilatéral, critiquant indirectement l’approche bilatérale de Pékin.
  • La presse japonaise relate des innovations de paix chinoises à faire mûrir, avant le symposium. Postérieurement, le Japan Times rend compte des fonds d’assistance accordés à l’UNRWA en janvier 2018.
  • Les médias britanniques, annoncent les ambitions militaires de la Chine au-delà de l’Asie en juillet 2017, suivi d’un compte-rendu de la coopération sino-britannique en janvier 2018, accompagné d’une vidéo de Mahmoud Abbas sollicitant une conférence du Conseil de Sécurité de l’ONU, élargissant les horizons explorés par les récentes initiatives chinoises et françaises.
  • Les Etats-Unis émettent des sous-entendus en comparant l’approche humanitaire norvégienne basée sur le savoir et l’approche chinoise d’aide au développement inconditionnelle en octobre 2017. En janvier 2018, une évaluation de la première année de la présidence Trump et sa politique étrangère isolationniste fait mention implicite de la Chine en tant que concurrente, ayant largement bénéficié de l’absence américaine sur la scène internationale.
  • Les médias turcs prévoient de l’agitation au Moyen-Orient après le positionnement américain sur Jérusalem, forçant les palestiniens à former des alliances régionales.
  • Les informations russes ne couvrent pas l’évènement.

Cette étude des choix éditoriaux des médias internationaux autour de l’initiative chinoise pour la paix révèle des commentaires intéressés, des descriptions explicites et implicites de l’entremise chinoise à l’international, côtoyant un démenti flagrant de ses capacités d’arbitrage de conflits et indiquant un scepticisme ostentatoire.

Bien que l’absence de couverture médiatique puisse avoir été causée par l’extrême circonspection de Pékin, tenant l’évènement à huis clos – illustrant la diplomatie de quasi-médiation, les comptes-rendus brillent par leur absence et discréditent ouvertement les efforts de paix chinois.

Projections

Au vu de l’engagement de Xi d’organiser de futurs sommets, il est prévu une consolidation de la participation de la RPC dans le processus de paix israélo-palestinien.30 L’année 2021 sera décisive selon l’étendue de la crise économique suscitée par le COVID-19 tandis que l’administration Biden annonce un renouveau de multilatéralisme et de modération envers la Chine, restreignant la latitude de Xi à l’international.

Cependant, des prérequis persistent avant que la Chine devienne un influenceur diplomatique en Israël-Palestine :

Une politique extérieure davantage proactive pour une participation efficace en gouvernance sécuritaire31 est nécessaire avec un remplacement du dogme de non-ingérence devenu obsolète. Cela pourrait conférer flexibilité par rapport au fardeau de l’idéologie fondatrice.32 33 34 35

Une expansion du savoir sur les sociétés civiles israéliennes et palestiniennes est indispensable afin de renforcer la confiance sur le terrain et d’accorder des leviers lors des négociations.

Une attribution cohérente de ressources diplomatiques pour une participation constructive en résolution de conflit est essentielle. L’investissement en efforts politiques adéquats de Pékin permettra d’amener ses actions de paix à progresser en une approche complète vis-à-vis du paysage ethnoreligieux et sécuritaire local : une ‘diplomatie régionale d’ensemble’ allant au-delà de l’angle économique. En exerçant son influence dans les débats, normes et pratiques internationales en médiation de conflits, la place de Pékin devrait croître pour permettre d’appliquer son ‘intervention légitime de grand pouvoir’ ou ‘droit d’ingérence aux caractéristiques chinoises’ afin de permettre la formation d’initiatives citoyennes en ingénierie sociale.

Un élargissement de l’appareil de forum diplomatique est requis avec l’internationalisation du symposium. Une programmation annuelle et un ralliement de la communauté internationale pour davantage de consultation politique, de résolution de problème en commun et de transparence pourrait conduire la Chine à être plus compétente en terme de consolidation de la paix.36

Un partenariat stratégique sino-américain au Moyen-Orient est souhaitable, au vu de la complémentarité des intérêts commerciaux et politiques permettant une compatibilité pour une coopération de grands pouvoirs. Une alliance de gouvernance éco-politico-sécuritaire au Moyen-Orient serait moins contradictoire que dans la région Asie-Pacifique.37 38 L’alignement des priorités, méthodes et politiques sino-américaines dans un cadre commun pourrait faire émerger une nouvelle orientation dans le processus de paix israélo-palestinien en combinant des styles de diplomatie ‘doux’ et ‘durs’ et déclencher des valeurs absolues pour une prévention organique du piège de Thucydide.

Conclusion

En tant que véhicule de la diplomatie économique chinoise et d’une politique extérieure tournée vers l’ouest, les NRS ont créé une plateforme pour le pivot arabe et pour les tentatives de résolution de conflits locaux de par la conduite d’une gouvernance économique selon le paradigme de paix par la croissance. La mutation du projet géoéconomique d’origine en un moteur géopolitique confère au militantisme stratégique de Xi une élévation en une force conciliante capable d’arbitrage dans les négociations de paix.

Mais les efforts de Pékin pâtissent d’un défi doctrinal et n’ont pas encore été équipés de plans d’action concrets. Les analystes tendent au consensus selon lequel il sera impossible à la Chine de conserver son attitude apolitique lors de l’exécution d’entreprises commerciales risquées sur des terrains propices à la guerre. La méthode peu impliquée en gestion de conflit et les promesses d’amélioration sociale jusqu’ici non tenues font que les NRS requièrent une nouvelle approche quant à la politique locale afin d’arbitrer le conflit et de produire des résultats durables en Israël- Palestine. Une reconceptualisation des méthodes devrait comprendre une réforme de la posture diplomatique chinoise, avec un ajustement de la doctrine de non-ingérence tout en mettant l’accent sur l’action politique avec :

  • une allocation de ressources pour renforcer la confiance et stabiliser la région,
  • un positionnement audacieux sur les dossiers délicats : le partage du pouvoir dans les territoires palestiniens, les ressources hydrauliques et les réfugiés palestiniens,
  • un lien avec des associations locales et des membres de la Knesset pour la solution à deux états,
  • un élargissement du répertoire diplomatique,
  • une systématisation des propositions de paix équipées de mesures pratiques,
  • une institutionalisation du symposium.

Pékin devrait s’engager dans une approche holistique couvrant les sphères économiques, politiques et sécuritaires tout en ayant recours à sa culture diplomatique westphalienne pour émerger en tant que pilier de la stabilité régionale. Ces actions devraient stimuler la capacité pacificatrice de Xi et assortir ses aspirations de rayonnement diplomatique au Moyen-Orient d’étapes concrètes. La stratégie économique de construction d’infrastructures pourrait s’avérer être efficace afin de réifier la Pax Sinica et d’accéder à un poste de gouvernance à la fois régionale et mondiale si toutefois accompagnée d’une dimension politique. Il reste à voir si la diplomatie de développement aura le pouvoir de propulser Pékin au sommet et évincer Washington, titulaire actuel du poste de médiateur pour la paix. Israel Chine

一山不容二虎: Une montagne ne peut accueillir deux tigres.


Jacinthe Nourrit, consultante en stratégie, analyste en politique étrangère, spécialiste des Nouvelles Routes de la Soie et des relations Chine-MENA


Sources

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  2. James M. Dorsey, ‘China and the Middle East: Venturing into the Maelstrom’, S. Rajaratnam school of International Studies Singapore, no. 296 (18 March 2016).
  3. Anoushiravan Ehteshami, ‘Gold at the End of the Rainbow? The BRI and the Middle East’, Global Policy 9, no. 3 (2018): 387–97, https://doi.org/10.1111/1758- 5899.12552.
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