Dans la vallée de la rivière Mellegue, une rivière traversant la province du Kef, dans le nord-ouest de la Tunisie, un barrage géant est en construction qui, une fois les travaux achevés, deviendra l’une des plus grandes installations de conservation d’eau en Afrique du Nord.

La Tunisie qui souffre d’un stress hydrique pouvant menacer son approvisionnement en eau, est en besoin vital de développer des projets hydriques. Classée au 30e rang des pays confrontés à un niveau élevé de stress hydrique, la Tunisie est appelée à faire face à d’autres changements climatiques d’autant plus bouleversants, notamment la sécheresse qui menace 75% du territoire national par la désertification.

Etant située en grande partie en zone aride, la disponibilité de l’eau par an et par habitant est depuis plus de 30 ans inférieure à la limite de la pénurie d’eau absolue (500 m3/an/habitant). Actuellement 92% du potentiel des eaux de surface ont été mobilisées fragilisant les écosystèmes, premiers usagers de la ressource. A titre indicatif, six grands barrages ont été construits sur les six principaux cours d’eau autour du lac Ichkeul, le privant ainsi des ressources qui l’alimentaient autrefois pour assurer son équilibre et réduisant notablement les populations d’oiseaux migrateurs qui en dépendaient.

Plus de 4/5 de l’eau (82%) mobilisée est alloué pour l’agriculture irriguée qui ne couvre que 4% des terres agricoles. Aussi, 80% des besoins en eau du secteur irrigué provient des nappes souterraines, où l’on assiste à une surexploitation alarmante par la prolifération des forages illicites engendrant une détérioration de la qualité de l’eau des nappes (par l’intrusion marine, par exemple) et donc la salinisation des sols.

Le barrage d’Oued Mellegue paraît, dans ce contexte, d’une grande importance pour le pays. D’une capacité maximale de 305 millions de mètres cubes d’eau, il jouera un rôle important dans la protection de l’environnement écologique en Tunisie et représentera une source considérable d’irrigation. Le barrage sert, en ce sens, trois objectifs : la régularisation interannuelle de l’Oued Mellègue afin d’éviter l’inondation de la plaine de Jendouba, l’irrigation de la basse vallée de la Medjerda et la production d’électricité. Une fois fini, le barrage permettra au secteur agricole de la région du Kef de connaître une grande évolution, dans un contexte caractérisé par le retour du débat sur l’importance de l’agriculture.

Le projet constitue, également, un pôle d’attraction pour les travailleurs locaux. Près de 300 Tunisiens sont actuellement employés pour travailler sur le projet, ce qui a contribué à la création d’emplois dans la région et au transfert des technologies, permettant d’améliorer les compétences professionnelles des travailleurs locaux.

En mai 2016, la Power Construction Corporation of China (Power China) a remporté l’appel d’offres pour la construction d’un nouveau barrage sur la rivière pour remplacer l’ancien délabré. Le coût du projet est estimé à environ 178,37 millions de dinars (91,27 million de dollars). Prévu pour Septembre 2023, le projet enregistre un avancement régulier selon un calendrier prédéfini.

Découvrez le premier Barrage de Mellegue

La coopération Tunisie-Chine en matière hydraulique a toujours été bénéfique pour les deux parties dans une logique « gagnant-gagnant ».

En effet, la Chine est un partenaire de longue date de la Tunisie en matière d’hydraulique. Le canal Medjerda-Cap Bon, mis en service en 1982, en est une belle illustration. A présent, c’est le barrage sur l’Oued Mellègue qui prend la relève.


Donia Jemli, Cheffe de pôle Afrique du Nord, diplômée de l’université européenne de Tunis. Elle se spécialise dans les relations internationales, diplomatiques et stratégiques.