La Syrie a signé un protocole d’accord (MOU) sur l’initiative chinoise la Ceinture et la Route (BRI), alors que le pays cherche à se reconstruire après la guerre. La signature a eu lieu à la Commission syrienne de planification et de coopération internationale à Damas, en présence de Fadi Khalil, chef de la commission, et de Feng Biao, ambassadeur de Chine en Syrie.

Cette décision a été prise deux jours avant la visite prévue du ministre iranien des Affaires étrangères en Chine, dans le cadre des visites intensives en Chine des responsables du Moyen-Orient et du Conseil de coopération du Golfe.

Lors de la signature, M. Khalil a déclaré que l’admission de la Syrie dans l’initiative la Ceinture et la Route ravive l’ancien rôle de la Syrie dans l’ancienne Route de la soie et contribuera à stimuler la coopération bilatérale avec la Chine et la coopération multilatérale avec d’autres pays. L’Ambassadeur Feng a ajouté que la coopération entre les deux pays apporte la plus grande contribution à la reconstruction économique et au développement social de la Syrie et qu’elle renforce également l’harmonisation entre la BRI et la stratégie d’ouverture vers l’est proposée par la Syrie.

La Syrie, qui a survécu à la « révolution blanche » et à la guerre civile, est entrée dans une phase de reconstruction, et sa décision de signer le protocole d’accord avec la Chine l’y aidera.

La signature par la Syrie du protocole d’accord sur l’initiative la Ceinture et la Route intervient alors que la Chine mène une diplomatie intensive au Moyen-Orient. Les ministres des affaires étrangères de l’Arabie saoudite, du Koweït, d’Oman et de Bahreïn, ainsi que le secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe (CCG), Nayef bin Falah al-Hajrah, se sont rendus en Chine pour discuter de la sécurité énergétique et d’un éventuel accord de libre-échange, tandis que les ministres des affaires étrangères de la Turquie et de l’Iran doivent également se rendre en Chine cette semaine.

La Syrie est soumise à de fortes sanctions occidentales et connaît des difficultés économiques. Damas est désireuse de se reconstruire dans un contexte d’isolement de l’Occident, qui souhaitait la destitution du président Bachar Al-Assad en raison d’accusations de violations des droits de l’homme pendant la guerre civile.

Les défis de la reconstruction sont immenses en Syrie, la Chine sera un acteur incontournable

Le conflit qui s’en est suivi a laissé le pays en grande partie en ruines, Damas étant confronté à de graves pénuries d’électricité en raison de la destruction et de l’inefficacité des infrastructures. La Chine, ainsi que la Russie et les pays du Moyen-Orient, sont susceptibles de constituer la solution. La Syrie est le seul pays producteur de pétrole brut dans la région de la Méditerranée orientale et possède également d’importantes réserves de gaz.

L’attrait de la Syrie réside dans sa capacité à exploiter les « cinq mers », un plan visant à relier la mer Caspienne, la mer Noire, la Méditerranée et la mer Rouge au golfe Persique.

La participation de la Syrie à la BRI créerait un nouveau corridor à travers le Moyen-Orient reliant l’Iran à la Syrie via l’Irak, et serait bénéfique pour tous les États de la région. Malgré les conflits historiques entre l’Iran et l’Irak, Pékin et Moscou ont réussi à construire un pont entre eux. L’Irak a accepté de développer un réseau ferroviaire transfrontalier avec l’Iran au passage de la frontière entre les deux pays au niveau du corridor de Bassora/Shalamchek, qui mène lui-même aux ports du sud de l’Iran sur le golfe Persique et se connecte au corridor international de transport nord-sud (INSTC). Cette route multimodale mène vers l’est aux ports de la côte ouest de l’Inde, puis vers le nord à la mer Caspienne, l’Azerbaïdjan et la Russie, avec un embranchement nord-est menant à l’Afghanistan.

Selon le ministère chinois du commerce, les investissements chinois en Syrie ont totalisé 135,7 milliards de dollars en 2019. Les échanges commerciaux entre les deux parties ont totalisé 1,3 milliard de dollars en 2019, soit une augmentation de 33 % en glissement annuel.

La Chine a participé activement à la reconstruction économique de l’Irak, la coopération bilatérale et pratique faisant des progrès constants dans le pays. Cette expérience sera d’une valeur inestimable en Syrie.

La Syrie est désormais tournée vers l’est, vers la Chine et la Russie, même si elle reste une nation méditerranéenne avec un port maritime clé à Lattaquié. Les efforts de reconstruction de la Chine peuvent être jugés à l’aune des récentes exportations vers le pays, qui comprennent, pour le plus gros volume d’articles, des machines, des chaudières, des réacteurs nucléaires, des équipements électriques, du fer et de l’acier, des véhicules, des plastiques, du caoutchouc, des bâtiments préfabriqués, d’autres métaux, des textiles et du coton en quantités importantes.

À l’heure actuelle, en raison de la destruction des installations, les exportations syriennes d’énergie vers la Chine sont minimes et le pays vend actuellement des animaux et des céréales à la Chine. On peut cependant s’attendre à ce qu’une grande partie des coûts de développement des infrastructures de la BRI syrienne soit réalisée sous la forme d’exportations d’énergie.


Par Adrien Mugnier, Directeur de l’Observatoire Français des Nouvelles Routes de la Soie